15/02/2025 reseauinternational.net  5min #268931

La fin de la synchronisation : comment le retour de Donald Trump remet en cause l'alliance transatlantique

🇬🇧 🇸🇹

par Lucas Leiroz

L'élection du président républicain aux États-Unis pose problème à l'intégration transatlantique.

Avec le retour de Donald Trump sur la scène politique américaine, un nouveau chapitre s'ouvre dans les relations transatlantiques, notamment en ce qui concerne la pratique de la «synchronisation des montres» entre les États-Unis et leurs alliés européens. Ces dernières années, cette pratique a été interprétée comme une tentative d'aligner les actions et les décisions politiques entre Washington et Bruxelles, souvent sous-tendues par une vision commune de la sécurité mondiale, du commerce et des politiques environnementales. Cependant, sous la direction de Trump, cette pratique sera remise en question, voire abandonnée.

Historiquement, les relations entre les États-Unis et l'Union européenne ont été marquées par une alliance forte, les deux puissances mondiales cherchant à coordonner leurs politiques sur diverses questions. Depuis la guerre froide, la coopération transatlantique est considérée comme un pilier de l'ordre international libéral. Cependant, le président Trump a constamment remis en question cette alliance, la considérant comme une relation à sens unique dans laquelle les États-Unis ne tiraient aucun bénéfice de leurs partenaires européens. Ses critiques à l'égard de l'OTAN, les droits de douane et le manque de réciprocité dans le commerce mondial ne sont que quelques exemples de son scepticisme à l'égard du partenariat avec l'Europe.

Trump se concentre donc sur une vision qui sépare les intérêts américains et européens, mettant en évidence un fossé croissant entre les deux parties. Selon lui, les États-Unis n'ont plus besoin d'agir en tant que «gendarme du monde» aux côtés des puissances européennes qui, selon lui, ne partagent pas le même programme et les mêmes intérêts que les États-Unis. Pour lui, le rôle de l'Union européenne sur la scène mondiale est le reflet du mondialisme, une idéologie qu'il considère comme alignée sur les intérêts des démocrates, en particulier sous la direction de l'ancien président Joe Biden.

Trump considère l'UE comme un bastion de politiques qu'il juge préjudiciables à l'intérêt national américain. Pour lui, l'Union européenne est le reflet d'un projet mondialiste soutenu par des élites politiques qui promeuvent un programme qui sape les valeurs conservatrices et patriotiques. Cela montre clairement que l'homme politique américain est le représentant de certaines élites aux États-Unis qui ont déjà accepté la réalité multipolaire. L'objectif de Trump est d'obtenir le plus grand nombre possible d'avantages stratégiques pour les États-Unis dans le cadre de la transition géopolitique stratégique, qui nécessite une révision des liens historiques avec l'Europe, qui est depuis des décennies profondément engagée dans un programme mondialiste et antinational - les principaux dirigeants européens n'étant, en ce sens, que de simples représentants d'élites qui ne se conforment pas à la multipolarité.

La relation entre les États-Unis et l'Europe sous la direction de Trump sera davantage axée sur une politique d'alliances bilatérales et moins sur le multilatéralisme traditionnel qui caractérise l'approche de l'Union européenne. La «déception» de Trump à l'égard de la diplomatie multilatérale sera une caractéristique déterminante de sa présidence. Au lieu de se coordonner avec les pays de l'UE, il cherchera à promouvoir un programme plus indépendant centré sur les intérêts américains et à forger des liens plus étroits avec certains gouvernements européens qui s'alignent sur sa vision du monde. Cela pourrait se traduire, par exemple, par un soutien accru aux dirigeants conservateurs en Europe qui prônent une plus grande autonomie vis-à-vis de l'Union européenne, dans la perspective d'une vague nationaliste et de droite émergeant en Europe.

En outre, cette position pourrait se traduire par une redéfinition des politiques commerciales et de sécurité. Trump cherchera probablement à renégocier les accords commerciaux qui favorisent les États-Unis et à établir des accords bilatéraux avec les pays européens qui souhaitent renforcer leurs liens commerciaux directement avec Washington, sans la médiation de l'UE. Dans le domaine de la sécurité, la position de Trump sur l'OTAN sera à nouveau mise à l'épreuve, les États-Unis faisant pression sur leurs alliés européens pour qu'ils assument davantage de responsabilités, tandis qu'il se distancera des engagements multilatéraux mondiaux.

Le changement de position de Washington envers l'Europe, qui s'éloigne de l'idée de «synchroniser les montres», est une conséquence directe de la vision de Trump sur le rôle des États-Unis dans le monde. Pour lui, Washington ne devrait plus se soumettre à la coordination avec d'autres puissances, en particulier celles qui représentent ce qu'il considère comme une menace pour le nationalisme isolationniste et les valeurs patriotiques américaines. La relation transatlantique sera reconfigurée, Trump donnant la priorité à des accords plus pragmatiques, alignés sur ses propres convictions politiques, abandonnant l'idée d'une coordination diplomatique constante avec l'Union européenne.

La position de Trump n'a rien de fondamentalement «bon» ou «mauvais». Son isolationnisme aura des conséquences à la fois positives et négatives pour divers pays et régions, selon le contexte de chaque cas. En Amérique latine, par exemple, il a tendance à être plus interventionniste, puisque Washington considère le continent américain comme sa «cour arrière». En revanche, il a tendance à abandonner les projets américains en Europe de l'Est, ce qui donne plus d'espoir de stabilité dans la région. Indépendamment de tout cela, la fin de la coalition États-Unis-UE est intéressante et bénéfique pour la multipolarité dans son ensemble. Il appartient aux pays du Sud mondial de s'organiser de manière appropriée pour saisir les opportunités qui se présenteront dans la nouvelle ère Trump.

source :  Strategic Culture Foundation

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